Pour de nombreux parents, la succion, qu’il s’agisse de la tétine ou du pouce, est un sujet d’inquiétude. « Est-ce normal ? Est-ce néfaste ? Quand l’arrêter ? » Tous les parents se posent cette question en élevant son enfant. Les spécialistes en orthodontie y répondent. Est-ce normal ?
La succion est un besoin naturel du nourrisson. C’est en absorbant le liquide amniotique dès la 12ème semaine in utero, et parfois en suçant son pouce, que le fœtus développe les mouvements de succion qui sont indispensables à sa croissance et à sa survie après la naissance.
On parle de succion nutritive lors de l’allaitement ou de la prise du biberon. Attention, ce sont deux mécanismes de succion bien différents (le premier est actif et l’autre passif). Mais il existe aussi des mouvements de succion non nutritive comme la succion d’un pouce, d’une tétine, de la langue voire des lèvres, ou encore d’un objet transitionnel (doudou).
C’est une fonction physiologique normale dans les premières années de vie.
Est-ce néfaste ?
Les succions présentent des avantages.
L’intérêt de toutes les succions, qu’elles soient nutritives ou non, est d’apporter du plaisir, d’apaiser, et de calmer l’enfant. La succion a une fonction apaisante pour l’enfant, favorisant entre autres l’endormissement.
Elle présente également une dimension affective et psychologique très importante.
Une étude1 mesurant l’impact de la succion d’une tétine sur la réduction du temps de gavage par sonde chez les bébés prématurés, montre que celle-ci aurait un véritable effet positif. Elle permet au nourrisson prématuré d’acquérir plus rapidement la fonction coordonnée de « succion- déglutition-respiration ». On estime que 80 % des enfants en Europe utilisent une tétine dans les premiers mois de leur vie.
Les succions présentent aussi des inconvénients.
Les succions peuvent interférer avec l’allaitement et diminuer l’efficacité de la tétée. Par ailleurs, en plus d’être des réservoirs potentiels de microbes, les tétines augmentent le risque d’otites en entraînant des dysfonctionnements de l’oreille moyenne.
Enfin, en cas de succion non nutritive prolongée après 3 ans, il y a un risque élevé de dommage pour le développement du palais, des arcades dentaires et des fonctions respiratoires et masticatoires. En effet, parallèlement au mouvement de succion, se développe un automatisme de respiration buccale ; la mâchoire supérieure ne se développe pas assez en largeur et les incisives s’inclinent vers l’avant. La succion de la tétine peut alors conduire dans certains cas à des retards de croissance et des apnées du sommeil.
Contrairement à certaines idées reçues, l’impact du pouce ou de la tétine est sensiblement le même. Le pouce est un peu plus dur et plus large mais la tétine, présentée quelques fois comme physiologique, engendre des déformations comparables.
Quand arrêter ? Pour éviter ces dysfonctionnements, les parents doivent contrôler l’utilisation de la tétine dès 6 mois, afin qu’elle ne créée pas une addiction et la réserver à l’endormissement. L’idéal serait qu’elle ne sorte
pas du lit.
Une succion non nutritive qui perdure au-delà de 3 ans est considérée comme une parafonction. En effet l’enfant ayant atteint un certain niveau de maturité affective et psychologique ne doit plus ressentir le besoin de succion non nutritive et doit l’abandonner progressivement. On ne parle plus alors de besoin mais d’habitude entraînant un « confort ».
Si l’enfant présente des troubles suite à l’utilisation de la tétine à ses 3 ou 4 ans, une correction orthodontique sera à prévoir dès le plus jeune âge de l’enfant. Le praticien pourra dépister l’apparition des déformations, alerter, motiver, accompagner les enfants et les parents et bien sûr soigner par un traitement précoce.
Comment arrêter ?
Pour aider les enfants, il faut éviter d’être dans le reproche. Adopter un discours valorisant est la bonne méthode.
Il est bien sûr plus facile d’arrêter la succion d’une tétine que du pouce. Un bon truc pour rompre l’habitude de succion d’une tétine est de ne pas autoriser le jeune enfant, à partir de 12-18 mois, à l’avoir en dehors du lit. Les parents qui amènent leur enfant de deux ans à l’extérieur de la maison avec la tétine contribuent à maintenir cette habitude.
En cas de doute ou de difficulté, si on pense avoir épuisé toutes les méthodes pour aider son enfant à abandonner la tétine ou le pouce, il ne faut pas hésiter à consulter un médecin ou un praticien.
Parfois la parole d’un intervenant extérieur est une aide certaine.
« En tant que pédiatre, nous n’avons pas à prescrire ou interdire la tétine. Notre rôle consiste à vérifier, rassurer et accompagner les parents dont les enfants ressentent le besoin de téter ou au contraire ceux qui ont un usage excessif de la tétine » souligne le Dr Valleteau de Moulliac, pédiatre.
Le rôle du dentiste est d’expliquer aux parents, qui n’en ont pas forcément conscience, ainsi qu’à l’enfant, quelles sont les conséquences concrètes liées à la succion non nutritive.
Si la succion du pouce est un véritable phénomène physiologique, la succion de la tétine est mise en place par les parents et à ce titre doit être contrôlée par eux. Dans les deux cas cette succion non nutritive répond à un véritable besoin dans les premières années de vie. Cependant cette habitude peut avoir de nombreuses répercussions sur le développement oro-facial si elle persiste au-delà̀ d’un certain âge.
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